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Les Échos: Sylvie Guinard emballe le monde de l'industrie

  

Sylvie Guinard, patronne de Thimonnier.

 

Cette patronne lyonnaise a fait d'une PME centenaire un fleuron du savoir-faire français, concepteur et fabricant de machines de conditionnement en contenants souples.

Sylvie Guinard est sur orbite, étoile filante dans l'industrie française. La patronne de Thimonnier, fabricant de machines industrielles près de Lyon, rêvait d'être spationaute. La seule femme du comité de direction du Symop, le Syndicat professionnel des équipementiers industriels, est la nouvelle présidente de l'Inpi depuis novembre 2019, après avoir été successivement la touche féminine du Centre technique des industries mécaniques (Cetim), de la Fédération des industries mécaniques (FIM) et de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM).

 

Pas vraiment attendue

Cette petite blonde de quarante-six ans, montée sur ressort, volubile et débordante de rires contagieux, a succédé directement à son grand-père en 2009, adoubée après sept ans de bizutage à la tête de l'entreprise familiale. Elle n'était pas vraiment attendue. Le patriarche en place depuis l'après-guerre, responsable de la reconversion de l'entreprise centenaire de la machine à coudre à l'emballage souple, envisageait plutôt de la céder. Aucun de ses enfants, ni aucun de ses neveux à qui il avait confié la direction générale, ne trouvait grâce à ses yeux. Et les filles étaient exclues d'office…

Comme elles l'étaient aussi, avant Caroline Aigle en 1999, de la profession de pilote de chasse, passage obligé de l'astronaute. A l'époque où elle poursuivait encore ses rêves d'espace, Sylvie Guinard avait donc renoncé au pilotage pour la médecine spatiale, dans les pas de Claudie Haigneré. Avant finalement d'intégrer l'Estaca pour devenir ingénieur spatial. Recrutée en 1996 par Techlam, filiale d'Ariane Espace en Alsace, elle travaille sur des composants critiques des lanceurs de la fusée - et de chars d'assauts et de sous-marins nucléaires. Tout en prenant des cours de chant lyrique.

 

Une lutte contre l'étiquette de la pistonnée

La Lyonnaise retrouve sa ville en 2000, rapatriée « dans les valises » de son mari. « Je voulais créer ma boîte. Un diplôme d'ingénieur en béton plus une âme d'entrepreneur : mon grand-père s'est dit 'pourquoi pas ?' ». Elle plonge dans l'entreprise familiale en 2002, après un MBA à l'EMLyon. Son parcours initiatique, comme chef de projets, puis directrice technique et directrice générale adjointe, est semé de peaux de bananes… Ce sont des années difficiles pour la petite-fille, qui lutte contre l'étiquette de la pistonnée, et pour Thimonnier qui, traverse une mauvaise passe, sur fond de dissensions entre les branches héritières. La future présidente en tire quelques leçons. En 2013, Sylvie Guinard rachète aux treize autres actionnaires familiaux leurs parts de la société. Elle passe deux ans à les convaincre que c'est « le bon choix pour l'avenir de Thimonnier ». « Je n'aime pas passer en force, dit la mère de deux adolescentes. J'ai une équipe qui a envie de me suivre, pas une équipe que je tiens. »

Ses compétences techniques lui ont donné du crédit auprès des gaillards de Thimonnier, au bureau d'études comme à l'atelier où sont assemblées les machines de conditionnement en emballage souple, à usage médical, agroalimentaire ou sanitaire (15 millions d'euros de chiffre d'affaires, 80 salariés). « Je ne suis pas la présidente qu'on sort par politesse, j'ai mon avis éclairé sur les sujets ».

 

Préférence pour la mixité

Ses désirs d'exploration ne l'ont pas quittée. Mais le chevalier de la Légion d'honneur a découvert d'autres terres inconnues, le cerveau ou la physique quantique, thèmes de prédilection de ses livres de chevet. « Je suis d'une curiosité insatiable ». D'où son obsession de l'innovation, avec l'international (80 %) . Pas étonnant de la retrouver aussi au conseil d'administration de Business France.

Cette patronne très sollicitée préfère les solutions mixtes aux assemblées de femmes. « Je suis intervenue plusieurs fois chez FCE mais je ne suis pas membre », confie celle qui collectionne les trophées depuis dix ans. « Comme on est peu nombreuses dans l'industrie, on est chouchoutées », glisse-t-elle. Satisfaite d'avoir fait tomber le tabou dans sa propre entreprise, en ouvrant l'atelier aux femmes malgré les résistances tenaces.

 

Par Léa DUPONT, Correspondante à Lyon

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